mercredi 4 décembre 2019

Los Angeles (USA) - San Quintin (Mexico) : Welcome to Baja California

Un petit bonjour depuis San Quintín en Baja California, après quelques jours de pédalage. 

En arrivant à l’aéroport de Los Angeles, j’ai pu monter le vélo devant la porte de sortie du hall d’arrivée, sans que personne ne me demande quoi que ce soit et rejoindre ainsi un hôtel situé à quelques kilomètres. 



Pas de chance, le lendemain la météo était exécrable (soit-disant le Thanksgiving le plus froid et humide en Californie depuis un siècle). Visite rapide du centre-ville, déserté pour cause de jour férié puis des étoiles d’Hollywood Boulevard, ça c’est fait on va dire. 



Enfin c’est le grand départ le jour suivant. La doudoune est de rigueur au début pour pédaler et je me rends compte de l’immensité de LA, en suivant le même boulevard tout droit sur 25 km pour commencer à m’extraire de la ville. Une belle piste cyclable permet ensuite de rejoindre Long Beach au sud et de découvrir le Pacifique.





Ça y est, je fais du vélo en Californie avec 100 jours devant moi... je jubile et me la pète un peu, mais comme dirait l’autre, tout le monde s’en fout ! Un petit hébergement collectif bourré de chouettes graffs m’accueille en soirée.  









Le lendemain, je reprends la Pacific Coast Highway où ça circule à bloc, en parallèle de la freeway où ça roule encore plus. Je garde de ces journées aux USA l’image et le son assourdissant d’un flux intarissable de voitures fonçant vers on ne sait quoi sans sembler ne jamais s’arrêter, sur 4, 6, 8 ou même 10 voies. Heureusement il y a presque toujours une piste cyclable indépendante ou une bike lane sur le bord, clairement identifiée et très respectée. Dans l’aprem je rejoins Matthieu, un « ami d’amis », ça connecte direct entre nous et passons une très bonne soirée avec un accueil 5 étoiles chez lui à Solana Beach. 



Au petit matin, il m’initie au surf. Je n’allais quand même pas découvrir cette activité au Pays Basque à côté de la maison, moi c’est la Californie ou rien. Bon en fait j’ai surtout barboté à plat ventre sur du polystyrène en essayant de retrouver une otarie qui était pas loin en arrivant. 

Plus tard sur mon vélo aux abords de San Diego, après m’être un peu perdu dans l’entrelacs de freeways et de highways, une envie de soulager ma vessie devient très très pressante. Je m’arrête donc contre un rebord de fossé déjà assez glauque, encombré de détritus, en contrebas du talus d’une voie rapide.

Mauvaise idée ! 

Une policière passe à ce moment et m’interpelle. Pour commencer elle ne comprend pas que je ne sois en possession que d’un passeport français, elle souhaite voir une carte d’identité californienne. Je crois qu’elle ne situe pas très bien la France en fait. Ensuite elle m’accuse de salir sa terre, d’insulter son pays par ce geste et d’atteinte à la pudeur. Je sens que ça va être compliqué de s’en sortir sans amende mais je note aussi au fond de son regard un petit truc qui dit : t’as vraiment l’air con toi avec ton p’tit vélo et ton accent français à couper au couteau mais tu me fais un peu rigoler quand même. 


Je me confonds en excuses, lui fait une petite moue d’enfant qui a fait une bêtise, avec la fossette et tout. J’en suis finalement quitte pour un scan de mon passeport puis une photo de moi avec son téléphone, après avoir du enlever les lunettes de soleil. Une photo souvenir peut-être. Je n’ai pas osé lui demander si je pouvais la prendre, elle aussi... en photo. 



Une demi-heure plus tard sur un petit ferry qui permet de longer ensuite la baie de San Diego, un gars passionné de vélo vient me poser des questions sur mon voyage avec une bienveillance rare et finit même par me proposer de l’argent ! 

Les rencontres aux USA, dans le passé aussi, m’ont souvent interloqué tant elles peuvent être diamétralement opposées. 



Tijuana, construite à flanc de montagne face à San Diego approche. J’avoue avoir une petite boule au ventre tant on a pu me parler de cet endroit comme de l’enfer sur terre. Il faut dire que pendant que j’étais entrain de fermer mon appartement à 5 minutes de partir, j’ai reçu un appel de quelqu’un ayant vécu quelques temps dans une partie du Mexique, m’enjoignant de ne pas y aller car j’y avais toutes les chances d’être enlevé, à minima dépouillé, la situation locale étant « comparable à l’Afghanistan ». Pour faire court. 

L’avenir le dira mais c’est idiot d’être influençable à ce point car la toxicité de cet appel est restée malgré tout ancrée en moi jusqu’à la frontière. C’est bien la première fois que je me suis senti aussi tendu en entrant dans un pays, malgré quand même une certaine habitude du voyage en 50 ans. 

Le passage de cette frontière où ça brasse dans un sens comme dans l’autre sans interruption s’est déroulé dans une ambiance étonnamment détendue. Si bien que je l’ai même passée deux fois (!) car parvenu côté mexicain en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, je me suis rendu compte que je n’avais vu aucun bureau américain où faire apposer un tampon de sortie. Ne souhaitant pas être considéré comme clandestin chez Trump dans le futur, je refais donc tranquillement un tour. En entrant de nouveau aux USA, les officiers me confirment que ce tampon sur le passeport est inutile et ils me posent plutôt des questions sur ce vélo « amazing » dont ils veulent absolument connaître le prix.

Côté mexicain, l’officier me souhaite une seconde fois la bienvenue. Peut-être que c’est à cause d’une histoire comme ça la chanson de Manu Chao. 

Je rejoins un petit hôtel, sans qu’aucun narco-traffiquant ne me mette son poignard sous la gorge ni qu’aucun passionné du Tour de France ne me pique mon biclou. 



La route du lendemain me mène à Ensenada chez Chema, un hôte du site Warmshowers. Belle rencontre que cet informaticien passionné de vélo, de surf, d’art et préoccupé par la marche du monde. Merci pour cette belle soirée.





Ici, plus de bike lane comme en Californie, la sortie de Tijuana est un peu encombrée. Puis il faut choisir entre une 4 voies qui circule fort, sans bande de dégagement et l’autoroute payant (interdit aux cyclistes officiellement mais gratuite pour eux car j’y suis entré et sorti en marchant sur le trottoir, sous l’œil avisé des employés et de la police !).

La bande d’arrêt d’urgence offre une certaine sécurité mais étant encombrée de verres brisés et d’objets de toutes sortes, elle demande une attention de tous les instants. Un morceau de métal finit par avoir raison d’une de mes chambres à air, il faut réparer, heureusement à cet endroit il y a une interruption dans le grillage et je peux sortir me réfugier à un endroit sûr pour régler mon premier pépin technique. Je me trouve à l’entrée d’un de ces ghettos privés de résidences d’Américains qui ont colonisé toute la côte mexicaine. Il y a des allers et venues mais personne ne me demande si j’ai besoin de quelque chose. 





Depuis Ensenada, j’alterne entre de belles sections roulantes et peu fréquentées bordées d’une bonne bande de dégagement et des sections ambiance « salaire de la peur », sections passantes sans bas-côté avec juste assez de place pour deux camions se croisant mais où quelques uns arrivent quand même à y caser un cycliste en plus, sans compter les chiens qui surgissent au milieu de tout ça (heureusement pas souvent). D’une manière générale les automobilistes font quand même attention à ce drôle de cycliste solitaire, ni plus ni moins qu’en France. 















Demain le chemin continue pour 3 ou 4 jours en autonomie avec dodo sous la tente, à l’intérieur des terres jusqu’à Guerrero Negro. Le soleil devrait revenir et il paraît que la route, cette unique et donc obligatoire route qui descend toute la Baja California, devient beaucoup moins empruntée à partir d’ici. Ce serait super ! Il paraît aussi que des voyageurs en vélo sont passés par là ces dernières semaines de temps à autres. 

Voilà où j’en suis, à bientôt !